1- Le mot « mérite » est
relativement récent : on le trouve à partir du XII° siècle. Aujourd’hui il a
disparu de la plupart des théologies morales catholiques. Cependant il faut lui
consacrer quelques lignes : car, d’une part, il continue à être présent dans le
langage courant et d’autre part, il est très lié aux querelles entre chrétiens
aux temps de la Réforme.
2- Ce mot « mérite, comme
tous les mots utilisés par les chrétiens pour dire leur foi, est un mot tiré du
langage humain. On emploie le mot « mérite » pour dire que quelqu’un
a le droit d’être rétribué. Il est évident que ce mot pour bien traduire la réalité de la vie chrétienne doit subir
bien des transformations en profondeur.
Il est vrai aussi que ce même
mot, ayant été élevé à son rôle chrétien, peut en déchoir et desservir
l’expression de la foi, trahir cette foi.
3- C’est certainement le cas
si on réduit la foi chrétienne et le salut à une sorte de marchandage où
l’homme aurait un droit vis à vis de Dieu Le salut ne serait plus l’œuvre de
l’amour mais une sorte de transaction commerciale. Remarquons que les
mots employés par l’Ecriture : « récompense, couronne » peuvent être, eux
aussi, interprétés dans un sens faussé par rapport au message de la Parole de
Dieu.
C‘est contre ces abus bien
réels que les Réformateurs ont voulu réagir.
4-
« À l’égard de Dieu, il n’y a pas au sens strict de « mérite » de la part de
l’homme » rappelle le catéchisme pour l’Eglise catholique, n°, 2007.
5-
Il faut remarquer que le mot « mérite » a été d’abord employé pour dire l’œuvre
du Christ pour l’humanité, la rédemption. C‘était pour souligner que le salut
n’était pas octroyé d’une façon paternaliste par Dieu. En Jésus, le Père associe l’humanité aux dons
qu’il lui fait.
6-
Les chrétiens sont des « vivants pour Dieu » ; ils sont fils de Dieu en Jésus
Ressuscité ; Cette vie nouvelle, œuvre de l’Esprit, ne cesse de grandir pendant
toute leur existence. À cette croissance, chacun d’eux est associé. Ce n’est
pas du « malgré eux ». L’Esprit leur donne de collaborer. À la croissance du
Royaume, Dieu donne à chacun de participer.
7- Il faut prendre conscience
que ce mot « mérite » est très répandu dans la langue usuelle non
spécifiquement chrétienne. Il est peut-être mieux de ne pas trop le lier à la
foi chrétienne. Ne pas perdre de vue cependant qu’on le trouvera dans des
traductions de liturgies. Il faut donc déminer le terrain. Souvenons-nous enfin
que le pluriel de bien des mots fait tort au singulier. Le pluriel « chosifie »
les réalités qu’il désigne, en fait des choses : le mérite n’est pas de l’ordre
du matériel. Il veut traduire une relation interpersonnelle entre Dieu et
l’homme : c’est une relation d’amour et non un marchandage.